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J’m’ennuie de ma pelle

Par: Michel Laflamme & André Bisson

Frappés par la pelle du Sud. Allez dans le Sud si vous voulez, mais n’oubliez pas que, comme vous verrez plus loin, voyager est toujours un risque. On ne sait jamais ce qui peut arriver par trop grande chaleur.

Mise en garde de l’éditeur

On sait que les voyages sont des aventures qui peuvent être risquées. On ne sait jamais ce qui peut nous tomber dessus dans un pays loin de chez soi. Certains y ont perdu la vie, mais sans aller aussi loin, ça peut s’avérer pire qu’une simple tourista. Ce qui est arrivé à deux de mes amis, je ne le souhaite à personne, car ils furent atteints au plus profond de leur être, le « mental ». Leurs cellules auraient pu y rester. Oui, madame.

Heureusement, quelque temps après leur retour, grâce au grand air, un peu d’exercice et l’usage d’outils familiers, ils ont retrouvé leur état normal, avec un peu plus de sagesse et d’expérience; les épouses auraient un doute sur le dernier point, mais enfin. 

Curieusement, les symptômes n’ont eu aucune prise sur le sexe féminin.

Selon les épouses, la pathogénie ciblerait uniquement le mâle et résulterait de l’ingurgitation de mojitos, tequila, de Cinco de Mayo bu à la mauvaise date, et d’autres semblables féculents hallucinatoires. Tout cela n’est évidemment que théorie.

Nous publions donc le mémoire reçu de la bouche du cheval, ou plutôt de la main des auteurs, à de pures fins d’édification, d’éducation et de prévention.

SATIRE SUR LA FIN DE L’HIVER

Par Michel Laflamme & André Bisson

Mi-février 2012. Nous partons deux couples. L’un s’envole vers le Mexique et l’autre vers Fort Lauderdale. Nous nous sommes donné rendez-vous deux semaines plus tard, quelque part sur les plages de Floride.

Le pire ce n’est pas de partir, mais bien d’arriver ! On quitte son patelin à -15C, avec une magnifique bordée de neige d’à peine 25 cm la journée précédant le départ. En prime des vents de 50 km/h (hey hey !!!). On se retrouve quelques heures plus tard sous un climat presque tropical. Soudainement épiés par des palmiers — symbole des contrées chaudes de notre planète —, c’est là que le choc prendra lentement forme à notre insu !

Le but avoué de notre visite dans cette contrée de sable, entourée d’un immense plan d’eau dont les vagues viennent se jeter à vos pieds, est d’aller voir un ami d’enfance, Gaston. Il a décidé de prendre sa retraite dans cet état surnommé « The Sunshine State ». « Ouais ! » Gaston vit à Orlando.

Michel et André, avant le départ, alors que rien ne laissait présager le drame qui allait s’abattre sur eux

Début mars. Mon autre copain d’enfance, André et sa conjointe remontent du Mexique où ils sont allés visiter leur fille qui étudie à Huatulco. On s’appelle, avait-il promis. Mais, pas d’appel. J’aurais dû voir venir le drame. Cependant, ils viennent nous rejoindre à la journée prévue.

« Salut Michel ! Désolé, j’ai oublié l’appel »

« L’appel !!? », la pelle résonne dans ma tête et une larme inexplicable perle sur ma joue. Je ne vois encore rien venir, et pourtant.

« Content de vous voir les amis. Sentez-vous comme chez nous !… C’est fort ».

André et son épouse sont un peu frileux. Au Mexique, la température avoisinait les 40 degrés. Plein soleil. Leurs premiers jours ont été assez pénibles. Trente degrés seulement. Ne vous en faites pas. On s’y fait à la longue…

Un jour que nous marchions sur la plage et que nous faisions des plans pour remonter à Orlando voir Gaston, André s’arrête net, se retourne vers moi les yeux dans l’eau et me dit : « Michel j’m’ennuie de ma pelle » !

Regard furtif vers le nord ! Yeux hagards avec un étrange pincement au cœur, une pensée aussi subite que puissante m’envahit moi aussi : « Où est passé ma pelle »  ?

« Moi aussi, mon vieux, ma pelle me manque… tellement » !

Bref, mais lourd silence sous le ciel bleu vibrant qui semble soudain se couvrir pour laisser tomber la tristesse à gros flocons.

« Marchons encore dix minutes ; ça va passer ».

Silencieux, comme pour compter les minutes qui nous séparaient de ces phrases interdites, nous marchions, regardant droit devant nous, épuisant notre regard dans le bleu turquoise de cet horizon lointain.

« André, j’ai trouvé. Pourquoi ne demanderions-nous pas à nos enfants, qui ont hérité du déblaiement de nos entrées de cours, de nous faire parvenir un gros plan de nos pelles respectives, par courriel » ?

Quelques minutes après leur retour, ils sont photographiés par un voisin intrigué et stupéfait de les voir immobiles depuis 15 minutes. Les épouses ont dû défaire seules les bagages. Tactique ou prostration ? Allez-donc savoir !

« Bonne idée. Je l’achète ».

Nous sommes retournés à notre motel, pour nous ressaisir, laissant pour un moment notre déprime se dissiper peu à peu.

Ça va se passer… Ça va se passer !!!

Le soir venu, en compagnie de nos conjointes, nous sommes allés dans un « Starbucks Cafe » regarder les bateaux-croisières prendre l’océan et se perdre dans l’infini.

Levons nos verres et saluons ces gratte-ciel flottants !

Un instant plus tard, nous nous perdions dans nos pensées respectives, silencieux, nous imaginant saisir le manche de cet outil qui fait la fierté hivernale des Québécois quatre mois durant. Sic…

Bref, une semaine plus tard, nous sommes remontés à Orlando voir Gaston. De part et d’autre du train qui nous amenait chez notre confrère d’enfance, canards et oies du Canada avaient élu domicile. Enfin un point de repère.

Plus loin les orangeraies prenaient toute la place dans le paysage qui, comme nos vergers du Québec, ployaient sous le poids des fruits mûrs de cet état ; deuxième grand symbole du « ‘Sunshine State »’.

Soudaine et étrange sensation, vous en conviendrez. Là, nous sommes loin de notre pelle ! Fixation !!!

Une grande joie nous envahit quand, à destination, notre bon vieux « pote » nous attend à la gare.

J’suis venu vous « crire, » (quérir) lance-t-il, comme il se plaisait à dire quand nous étions ados. Il aimait bien le « “Pére Gédéon »” ce Gaston.

Michel, Gaston et André : soixante ans d’amitié et de bien joyeuses retrouvailles à The Villages, en Floride

Notre ami demeure à “The Villages”, ville modèle de retraités des cinquante ans et plus. Ici, on parle d’une jeune ville de 90 et bientôt, de cent mille de population avec une touche rétro. De toute beauté ! Tout y est : restaurants à volonté, bars, cinémas, centres culturels, piscines, terrains de golf, églises, hôpital, foyer pour aînés, lacs, parcs, et j’en passe. Joie de vivre assurée ! Il paraît que beaucoup de pays prendront cette ville comme référence pour leurs “boomers”. Nous n’avons vu que de “jeunes vieux” là.

Mal nous en prit de lui parler de notre hiver québécois qu’il a semblé avoir oublié au fil du temps. Nous avons tout fait pour le convaincre de venir passer au moins une semaine par année, en février. Fallait pas être trop cochons quand même. Un ami, c’est un ami… Nous lui avons parlé des joies de la pelle et du raffinement du plus important outil extérieur, ces dernières années. Seule réponse de sa part : un large sourire !

Décontenancés, ahuris, flabbergasted, incompris ??? À quoi bon ?

Après quelques jours d’une solide amitié qui ne s’est jamais trahie depuis cinquante ans, nous nous sommes quittés avec la promesse de se revoir dans douze lunes. Cette fois, nous ferons un spécial pour lui rappeler ses racines et tenter l’ultime, en lui apportant dans nos valises une jolie pelle ergonomique en aluminium, fabriquée en trois sections, avec manche chauffant, signée : «J’m’ennuie de ma pelle ».

Enfin de retour. Ma première pensée est pour… ma pelle. Est-elle encore là ? M’a t’elle quittée après quatre semaines d’absence ? Chez un voisin peut-être ? Est-elle enfouie sous la neige ? Partie pour le sud ? Pire encore, rejoindre le Plan Nord?… NON, elle est encore là, ma pelle ; bien plantée dans un beau banc de neige fondant. Comme un soldat au garde-à-vous. Elle m’attendait… Elle ne m’a pas quitté…snif, snif. Quelles belles retrouvailles !

J’adore ma pelle. La prochaine fois, je l’apporte avec moi dans mes valises, histoire de ne plus nous séparer. Elle me sera utile pour faire des dunes de sable – ICH ! — sur les plages du Mexique et de la Floride. Imaginez ! une pelle québécoise, sans bikini, sous les tropiques !!!

Raymond Vachon
SHSartigan
CarteVetementsSevigny
PBeauceville
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St-Côme

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