Les Patriotes, c’est pas juste le vieux bonhomme…
Le vieux bonhomme avec le fusil et la pipe a été sur un drapeau comme symbole, mais en fait, la lutte patriote représente un épisode incontournable de notre histoire et s’étend politiquement sur près de soixante ans.
La bataille fut majoritairement politique. Il ne faut pas l’oublier.
En ce jour de la fête des Patriotes, considérons quelques faits un peu méconnus.
La cause
Née en 1791, avec l’obtention d’une chambre d’Assemblée, la démocratie québécoise est l’une des plus anciennes au monde. La guerre de 1812 a été très couteuse pour l’Angleterre. La mère patrie exigeait des subsides, les patriotes les refusaient. La guerre parlementaire allait durer.
En février 1834, les députés patriotes adoptent 92 résolutions visant à accroitre le pouvoir des élus et combattre la corruption. Avec le rapport Russel, l’Angleterre refuse tout. En 1837, l’Empire britannique interdit les assemblées de patriotes et lance des mandats d’arrestation contre leurs chefs.
Les épisodes de violence ont été la manifestation d’une impasse entre la domination britannique et le Bas et le Haut-Canada. C’est-à-dire le Québec et l’Ontario.
À cette époque, une partie des délégations du Québec et de l’Ontario voulaient doter le pays d’institutions démocratiques élues « par et pour le peuple » afin de se libérer de la monarchie britannique.
Patriotes oubliés d’Ontario
En 1838, en Ontario, le maire de Toronto, William Lyon Mackenzie réclamait justice pour les petits agriculteurs, et la fin de la corruption et de la spéculation. Deux ans de rébellion résultant en 16 pendaisons et 86 exilés en Australie. Aujourd’hui, l’Ontario a oublié ses Patriotes.
Les drapeaux racontent l’histoire.
Drapeaux
On en connait trois. Le « drapeau de Saint-Eustache » avec une branche d’érable et un maskinongé ; le « drapeau de Saint-Charles » trois bandes, verte, blanche et rouge ; et le drapeau des « Frères-chasseurs » où deux étoiles sur fond azur représentent le Haut et le Bas-Canada au sein d’une république confédérée.
L’Acte d’Union de 1840
Le Rapport Durham réunit l’Ontario et le Québec, veut noyer la population francophone et fusionner les dettes ; celle de l’Ontario est 17 fois plus élevée que celle du Québec.
Advenant une séparation, le Québec devra-t-il payer 17 fois moins ?
Un Patriote, c’est quoi ?
Après la Révolution française de 1789, le patriote devient un citoyen fidèle à son pays et non plus « sujet du roi de France » Le patriote prête allégeance à la patrie et non plus à un roi ou une reine. La sujétion fait place à la citoyenneté ; du Roi à la République.
Déjà en 1838…
La Déclaration d’indépendance de 1838, du mouvement patriote spécifiait « que le Bas-Canada doit prendre la forme d’un gouvernement républicain, et se déclare maintenant de fait, RÉPUBLIQUE “. Le peuple est la seule autorité souveraine. Notons que le maire de Toronto, William Lyon Mackenzie, au mois d’août 1837, avait déclaré l’indépendance pour le Haut-Canada.
Alors qu’en 1838 les patriotes avaient beaucoup à dire sur un gouvernement ‘par et pour le peuple’, 177 ans plus tard, on ‘taponne’ encore sur le rôle accessoire de fonctions honorifiques comme celle de lieutenant-gouverneur.
Tout bien considéré, on peut dire que les patriotes sont à l’origine de la démocratie au Québec et au Canada.
Rôle de l’Église
Dépendant de la Couronne anglaise, le clergé catholique se range du côté britannique, à la fois pour assurer sa survie et recevoir des privilèges : diocèse à Montréal, religieux venus d’Europe, mission chez les autochtones, contrôle de l’éducation.
Il y a un fossé entre patriotes et curés. L’Église veut un système confessionnel (loi de 1824) et les députés patriotes votent, en 1827, pour un réseau laïc. Un système d’éducation catholique est implanté en 1842. Le ministère de l’Éducation est institué en 1964, 122 ans plus tard, et il faudra attendre 1997, 170 ans plus tard, pour laïciser le système.
Vous pouvez lire la Déclaration d’indépendance de 1838 ici. Remarquez que l’article 3 sur les Autochtones n’a jamais été atteint à ce jour, et que le scandale des pensionnats résultant des « missions » est encore d’actualité. http://www.1837.qc.ca/1837.pl?out=article&pno=document62
La principale source de cet article est la « Brève histoire des patriotes » de Gilles Laporte, publiée au Septentrion. 368 pages de plaisir, de 2015