Robert Vézina (1906-1989), témoin de l’histoire de Saint-Georges
Par: André Garant
Par André Garant
Les chemins de l’histoire qui ont été transmis de première main sont rares, mais d’autant plus crédibles, c’est connu. L’histoire de Saint-Georges-de-Beauce a été décrite par des observateurs qui ont présenté leur vision, bien sûr, mais quand on parle d’une publication datant de 1935, qui a bien pu connaitre l’auteur ? André Garant.
André Garant est une de ces personnes, qui, très jeune, cherchait déjà à remettre les faits en lumière. « On a toujours dit que lors du décès d’une personne, c’est une bibliothèque qui disparaît », affirmait-il, avec une justesse qui ne s’est pas démentie avec le temps.
Voici donc l’histoire de Robert Vézina, avec un préambule d’André Garant, tel qu’il l’a formulé.
L’histoire de Saint-Georges-de-Beauce a été publiée pour une première fois, en 1927, par le notaire Philippe Angers de Beauceville : Les seigneurs et premiers censitaires de St-Georges-Beauce et la famille Pozer. En 1935, l’avocat Robert Vézina, né à Saint-Joseph-de-Beauce, publie à son tour : Histoire de Saint-Georges de Beauce, en collaboration de Philippe Angers. Ces premières monographies méritent qu’on les lise.
Au fil des ans, Roger Bolduc a écrit plusieurs volumes sur le passé de Saint-Georges: Saint-Georges d’hier et d’aujourd’hui (1969), Essor d’une ville, Ville de St-Georges, 1907-1982, Personnalités beauceronnes (1971) et Biographies Beauce-Dorchester-Frontenac (1972).
André Garant a aussi fait paraître quelques volumes sur Saint-Georges : À l’ombre du clocher (1985), Le soleil se lève à l’ouest (1988), Sur les coteaux de l’Ardoise (1999) et Club de golf St-Georges, 50 ans d’histoire (2009).
Chacun possède en soi quelques pages de l’histoire georgienne. Pourquoi ne pas consulter et jaser avec nos aînés? Ils ont tellement de choses à raconter et plusieurs vivent dans l’oubli. Plusieurs familles ont fouillé et distribué à leurs membres leurs histoires familiales. Bravo!
Enfin, nos archives paroissiales et municipales sont sans doute conservées adéquatement. Les clubs sociaux et sportifs sont aussi des reflets de notre passé collectif. Depuis plus de 20 ans, la Société Historique Sartigan s’efforce de recueillir des facettes de l’histoire de Saint-Georges. Avec nos outils modernes de numérisation informatique, il demeure prudent de conserver ces témoins de notre vécu à Saint-Georges…d’une génération à l’autre.
ROBERT VÉZINA (1906-1989)
Témoin de l’histoire de Saint-Georges
Fils de l’avocat Ernest Vézina (1869-1944) et d’Alice Rochette (1875-1920), Robert Vézina (1906-1989) est né le 11 octobre 1906 à Saint-Joseph-de-Beauce. Il est le 8e d’une famille de 12 enfants. Son grand-père Zéphirin Vézina (1829-1917) arrive à Saint-Joseph-de-Beauce en 1856 et devient le premier protonotaire du Palais de justice.
En 1985, Robert Vézina me confie : « Il s’est occupé de la construction du palais de justice, car les juges, qui venaient de Québec, siégeaient dans une maison privée, soit là où est le Restaurant Marquis Jacques. Mon père fut nommé protonotaire de la Cour Supérieure, greffier de la paix et juge de paix. Il cumulait les fonctions judiciaires parce qu’il n’y avait qu’un seul autre avocat, soit un Taschereau.» Ernest Vézina installe alors sa pratique d’avocat à Saint-Joseph-de-Beauce. Il remplace ainsi son père Zéphirin.
Après des études au Collège Sainte-Anne-de-la-Pocatière et à l’Université Laval, reçu avocat en 1930, Robert Vézina pratique à Saint-Georges-de-Beauce. Me Rémi Bolduc (1884-1949) n’y pratique presque plus et Me Lorenzo Dutil (1895-1948) a quitté pour Montréal. Un an après son arrivée à Saint-Georges, l’avocat Paul-Émile Baillargeon (1908-1987) s’installe aussi à Saint-Georges. Me Clovis Thibaudeau (1910-1981) joint les rangs peu après.
« En ce temps-là, continue Robert Vézina, nous donnions des consultations à 50 sous (c’était cher dans le temps). Mon premier client fut un type de Saint-Zacharie qui me lança la pièce de monnaie par la tête en me disant que j’étais un cochon, après deux heures d’effort pour lui expliquer la consulte.»
Entre temps, à Saint-Joseph de Lauzon, le 2 juin 1934, Robert Vézina épouse Lucille Bélanger (1907-1991), fille de Joseph Bélanger et de Bertha Bolduc. Ils sont les parents de Lise (1935-), Marcelle (1938-) et Roger Vézina. Sa fille, Lise Vézina, a épousé le compositeur de musique André Prévost qui reçoit en 1977 la Médaille du Canadien de la musique et Officier de l’Ordre du Canada en 1986.
M. Vézina ajoute : « Ce fut la crise jusqu’en 1939. Les gens n’avaient pas d’argent, achetaient au magasin avec les pitons à Taschereau. Alors, j’avais du bon temps et je décidai d’écrire sur Saint-Georges (…).» À Beauceville, Quand Robert Vézina se déplace pour des consultations, il tient bureau dans l’édifice du notaire Charles Rioux (1903-1968), près de la Banque Canadienne Nationale (construite en 1918), soit sur le site actuel du Bureau de poste de l’est beaucevillois.
En 1935, lors de la commémoration du centenaire de l’érection canonique de Saint-Georges-de-Beauce, M.Vézina rassemble quelques collaborateurs et publie : Histoire de Saint-Georges de Beauce, 191 pages, 2000 exemplaires vendus à une piastre. Décédé en 1935, le notaire Philippe Angers (1858-1935) de Beauceville laisse des notes historiques précieuses. « Les documents que me passaient le notaire Angers lui ont été remis, d’ailleurs il s’agissait surtout des documents concernant deux chapitres de mon livre. Les photos, objets autres, sont à Saint-Joseph. Tout ce que nous avons fait était gratuit.»
En 1942, nommé avocat de la Couronne, Robert Vézina déménage alors à Saint-Joseph-de-Beauce, au même local que son père. Plus tard, il accède au poste de juge de la Cour du Québec.
« (En 1945), je fondai la Société historique de la Chaudière, ancêtre de la Société du Patrimoine des Beaucerons, avec le Frère Éloi Talbot, le curé Labbé de St-Éphrem et l’abbé (Honorius) Provost, archiviste à l’Université Laval. Le Frère Éloi choisissait la généalogie, l’abbé Provost l’histoire de Ste-Marie et moi celle de Saint-Georges. Nous donnions des conférences à nos dépends. Il fallait donner le goût aux gens qui souvent étaient réfractaires.» Ils éditeront :
– Volume 1 : Les Abénaquis sur la Chaudière, Honorius Provost, 1948
– Volume 2 : Quelques poèmes de Chapman, Luc Mercier, 1949
– Volume 3 : La Bonne Sainte Anne de Beauce, Honorius Provost, 1950
– Volume 4 : Le Couvent de Sainte-Marie-de-Beauce, Honorius Provost, 1957
– Volume 5 : Voirie et peuplement au Canada français, La Nouvelle-Beauce, Honorius Provost, 1965
« J’ai été un des premiers avocats des Syndicats catholiques à Québec, avec l’abbé Georges Côté.» En 1964-1965, Me Vézina est nommé à la Cour de magistrat de district. « J’avais gardé dans ma voûte de mon bureau une grosse valise remplie de documents historiques concernant la Beauce, y compris les vraies copies de concessions de seigneurie. Le Frère Éloi me les a empruntés pour faire des recherches. Comme ma voûte était encombrée, je les lui ai remis.»
De 1965 à 1973, il devient juge à la Cour provinciale du Québec. En 1973, en entendant une cause difficile contre un juge, M. Vézina subit une crise cardiaque. Après 43 ans de pratique, âgé de 67 ans, il prend alors sa retraite.
Le 30 juin 1987, lors des fêtes du 250e de la Beauce, à mon invitation, M. Vézina vient à Saint-Georges…« C’est l’heure de la récolte maintenant », m’écrit-il.
Il demeurait au Manoir Manrèse, avenue Murray, à Québec. Robert Vézina décède le 11 février 1989, à l’Hôpital Laval de Québec. Il est inhumé au Cimetière Belmont, à Québec. Zéphirin et Ernest Vézina sont enterrés à Saint-Joseph-de-Beauce.
Un fonds Robert-Vézina est déposé à la Société du patrimoine des Beaucerons, à Saint-Joseph-de-Beauce.
GÉNÉALOGIE VÉZINA
Jacques Vézina (Vezinat) (vers 1611-28 juin 1687), tonnelier, marchand / 10 juin 1640, contrat de mariage à LaRochelle, France / Marie Boisdon (-28 décembre 1677) (Jean Boisdon et Marie Bardin). ). En 1659, il est fait mention de lui pour la première fois en Nouvelle-France. Ils auront huit enfants : François, Marie, Anne, Louise, Jacques, Pierre, François, Jeanne.
Charles Vézina / 25 janvier 1746, L’Ange-Gardien, Montmorency / Barbe Huot (Nicolas Huot et Marie Chevalier)
Jean Vézina / 2 novembre 1778, contrat du notaire A. Crespin / Christine Cantin (Charles Cantin et Uursule Leclerc)
Charles Vézina (-1872), forgeron / 7 mai 1816, Notre-Dame, Québec / Marguerite Cloutier (Basile Cloutier et Geneviève Régimbald). Il est inhumé sous l’église de Saint-Joseph-de-Beauce.
Zéphirin Vézina, avocat (1829-1917) / 19 mai 1857, Notre-Dame, Québec / Marie-Caroline Trépanier (Pierre Trépanier et Marguerite Baillargeon)
Ernest Vézina, avocat (1869-1944) / 9 mai 1899, Saint-Joseph, Beauce / Alice Rochette 1875-1920 (Léon-Ambroise Rochette et Caroline Pélisson)
Robert Vézina, avocat (1906-1989) / 2 juin 1934, Saint-Joseph-de-Lauzon / Lucille Bélanger (1907-1991) (Joseph-Édouard Bélanger et Bertha Bolduc).
Enfants :
- Lise Vézina, née à Saint-Georges-de-Beauce en 1935 (épouse du réputé compositeur de musique André Prévost (1934-2001), fils du député et sénateur Jules-Édouard Prévost. André Prévost fut un élève du grand Beauceron Clermont Pépin
- Marcelle Vézina, née à Saint-Georges-de-Beauce en 1938. Épouse du Dr Jean-Louis Lavallée
- Roger Vézina, ex-époux de Marie Dionne, fille de Gérard Dionne (1900-1975) et de Gertude Pagé.(1909-2005)
André Garant
Sources :
Ancestry.ca
Avis de décès, Le Soleil
BMS2000
Correspondance personnelle avec Robert Vézina (19 septembre 1982 et 31 décembre 1985)
Fichier Origine
Histoire de Saint-Georges de Beauce, Robert Vézina et Philippe Angers, 1935, 191 pages.
Paroisse Saint-Joseph-de-la-Nouvelle Beauce, 1737-2006,Tome 2, Marcel Cliche, 780 pages
Philippe Angers, collaborateur de Robert Vézina http://www.patrimoine-beauceville.ca/notaire-historien-philippe-angers-1858-1935-