UN DEUXIÈME CAFÉ HISTORIQUE À MARIE-FITZBACK
La guerre et ses vétérans

Jean-François Roy, Fernand Gagnon, Pier Dutil, Bertrand Grenier et Carl Pépin formaient le panel du 2e Café historique sur La guerre et les vétérans, devant une salle très bien remplie.
On doit féliciter la ou les personnes qui ont eu l’idée de la formule des cafés historiques. Après Saint-Georges terrassant le dragon, l’audience a eu droit au thème « La guerre et ses vétérans », avec des invités forts intéressants, qui représentaient trois époques différentes.
Il s’agissait de monsieur Bertrand Grenier, 89 ans, le seul survivant beauceron de la guerre 1939 — 45, de Fernand Gagnon, vétéran de la guerre de Corée, et de Jean-François Roy, militaire en exercice qui a plusieurs missions de maintien de la paix à son actif.
Trois expériences extrêmement différentes qui montrent les grandes différences dans la façon dont les conflits se déroulent dans les trois quarts de siècle couvert.
L’encadrement historique était assuré par Carl Pépin, spécialiste en histoire militaire et historien officiel du Royal 22e régiment, qui faisait une mise en situation de la période avant chaque présentation.
Bertrand Grenier : 2e grande guerre
Monsieur Grenier a raconté ses péripéties dans le monde militaire avec beaucoup d’humour. Il habitait « dans le 3 de Saint-Martin » et, comme il n’aimait pas la ferme, et qu’il n’y avait pas de travail, a décidé de s’enrôler dans l’armée en 1942, alors qu’il avait 18 ans.

Fernand Gagnon et Pier Dutil sont tout ouïe alors que Bertrand Grenier fait part de son expérience à l’audience
Après avoir suivi des cours de mécanique en Ontario, il arrive en Europe en 1944 où il en suit d’autres, en plus de son entrainement, pour finalement être affecté aux Fusiliers du Mont-Royal, et arriver dans les zones de combat en Hollande. « J’ai pas aimé ça », dit-il. « Il y a des bouts dans l’armée qu’on essaie d’oublier et on ne peut pas ».
À la question « Qu’est ce que vous avez trouvé de plus dur ? » Il répond « Tout… surtout de perdre des chums ».
En 1945, il revient au pays sur le Queen Élisabeth avec 12 000 passagers, et le grade de caporal. Personne de ses amis ne le croira quand il révèle que le paquebot avait 1030 pieds de longueur. Plus long qu’une terre.
Le sens de l’humour et l’esprit vif de monsieur Grenier, âgé de 89 ans, ont grandement réjoui l’auditoire. On comprend que cette attitude lui a grandement servi dans les moments difficiles.
Fernand Gagnon : guerre de Corée, 1950
À 19 ans, fatigué de gagner 0,25 $ de l’heure, Fernand Gagnon s’enrôle dans l’armée canadienne. On l’envoie finalement au Japon dans un camp d’entrainement. En Corée, il est chauffeur de camion pour approvisionner l’armement et les munitions à la ligne de front.
« Qu’est-ce que vous avez trouvé le plus dur dans cette expérience ? » demande Pier Dutil. « Les mouches et la pluie » sort spontanément. Et la peur ? « Quand on est jeune, on n’a peur de rien ». Malgré tout, Fernand Gagnon considère que son année en Corée « a été une belle expérience ». Réussir à trouver le positif dans la difficulté fait montre d’une grande sagesse.
Incroyablement, monsieur Gagnon n’a parlé à ses amis de cet épisode de sa vie qu’il y a deux ans, à l’âge de 80 ans.
Maintien de la paix et imposition de la paix
Au moins 100,000 hommes ont porté l’uniforme de l’armée canadienne pour des missions de paix depuis la fin des années cinquante. En Yougoslavie, par exemple, il fallait imposer la paix. Dans ce genre de mission, précise Carl Pépin, « on sait jamais à quoi s’attendre ». Tout dépend du niveau de violence.
On pensait que la mission à Chypre allait durer six mois, elle a nécessité 29 ans.
Jean-François Roy
L’élément déclencheur de sa carrière s’est produit lorsque son père, Fabien Roy, l’a amené à une revue de corps de cadet. La piqure était donnée. Après les cadets et la milice, sa carrière était lancée. Sa première mission de paix est à Chypre en 1987. Il s’agit d’observer et de rapporter toute violation et tout mouvement anormal ou inhabituel. Il faut être vigilant, car une étincelle peut mettre le feu aux poudres. Aucun incident grave ne s’est produit, mais beaucoup de petits incidents.
Après une période en Allemagne, c’est la Croatie en 1993 où « ça brassait pas mal », assure Jean-François Roy. Des centaines de violations par jour, tirs, explosions, etc.
Haïti a suivi avec mission de renforcer la sécurité en aidant la police.

L’ex-député Fabien Roy et son fils Jean-François des forces armées canadiennes. Difficile de dire lequel est le plus fier de l’autre.
Afghanistan
En 2004, c’est l’Afghanistan pour 7 mois. Patrouille de présence, arrestation de personnes soupçonnées de terrorisme, vérification des indicateurs, qui sont parfois farfelus.
Monsieur Roy cite cet exemple d’une information reçue, prétendant qu’il « y a une Toyota Corolla jaune qui se promène avec une bombe dans le coffre ». En vérifiant, on découvre qu’il y a des Toyota Corolla jaunes partout à Kaboul.
Homme de terrain et non de paperasse, Jean-François Roy se rend dans les villages et la priorité d’éduquer la jeunesse. Beaucoup de ces villages ont été terrorisés par les talibans. Le Canada va bientôt se retirer. Qu’en pense Jean-François ? « Comme partout où nous sommes passés, ils ne sont pas contents de nous voir partir… c’est très inquiétant pour les Afghans ».
Parsemé d’anecdotes amusantes, on sent l’humour, la solidité de l’homme et même, en parlant des enfants Afghans, sa bonté naturelle.
On peut affirmer hors de tout doute que les personnes présentes, incluant ce journaliste, ont fortement apprécié les participants, sans oublier l’animation de Pier Dutil.
L’audience ayant déjà doublé pour ce 2e Café historique, on ne peut que féliciter l’initiative du comité culturel. Le prochain Café historique sera le 31 janvier 2014. Le thème choisi est à venir.