Les vieux bonshommes
Par: Joffre Grondin

Un bien beau billet, n'est-ce pas! Mais quel est le rapport entre cet homme et notre article? C'est ce que vous saurez plus bas.
Que ne reçoit-on pas sur internet ! De la merveille à la grossièreté, tout y passe. On peut facilement se laisser aller à tout jeter en bloc, mais en développant l’habitude de filtrer et de classer les choses très rapidement, on peut accumuler quelques perles.
Le vrai
Qui a bien pu écrire ce qui suit ? Et quand ?
« Les finances publiques doivent être saines, le budget doit être équilibré, la dette publique doit être réduite, l’arrogance de l’administration doit être combattue et contrôlée, et l’aide aux pays étrangers doit être diminuée de peur que Rome ne tombe en faillite. La population doit apprendre à travailler au lieu de vivre de l’aide publique. »
On la retrouve sur plusieurs sites, dont http://libertariens.chez.com/citationsa.htm C’est Cicéron, grand orateur de la Rome antique, qui a écrit ce qui précède en 55 avant Jésus-Christ. On dit que l’histoire se répète, que l’humanité refait les mêmes erreurs à toutes les époques.
Cela semble exact dans une très grande proportion, surtout lorsqu’il s’agit de principes à appliquer pouvant guider le comportement de la collectivité vers un mieux-être. Certaines choses semblent transmissibles à quelques individus seulement qui eux-mêmes ne pourront l’appliquer que de façon très limitée.
Il semble que dans toutes les civilisations, certains hommes ont compris des choses qu’ils n’ont pas toujours pu transmettre à leurs contemporains ou descendants, même très éloignés.
Pour les choses très matérielles cependant, c’est autre chose. Les inventeurs de la roue, de la cheminée et du marteau ont probablement eu très peu de difficulté à transmettre leurs inventions. L’avantage est immédiatement perçu, ce qui n’est pas le cas pour les choses plus impalpables.
Le beaucoup moins vrai
Thomas Jefferson,le troisième président des États-Unis, de 1801 à 1809, et rédacteur d’une partie de la Déclaration d’Indépendance, aurait écrit ceci dans une lettre à Albert Gallatin en 1802.
« Je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques, priveront les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquise ».
Le hic !
Petit problème. En consultant le site The Jefferson Monticello ici, http://bit.ly/hXBQbO
On apprend que jamais on n’a trouvé l’original de cette lettre. De plus, les mots « inflation » et « récession » n’étaient pas utilisés du temps de Jefferson avec le sens qu’on leur donne maintenant.
Ce qu’on a trouvé, par contre, est une lettre envoyé de Monticello, la maison de Jefferson, le 28 mai 1816 à John Taylor
« And I sincerely believe, with you, that banking establishments are more dangerous than standing armies; and that the principle of spending money to be paid by posterity, under the name of funding, is but swindling futurity on a large scale ». http://bit.ly/tHbDA7
Traduction : Et je crois sincèrement, avec toi, que les établissements bancaires sont plus dangereux que des armées prêtes au combat ; et que le principe de dépenser de l’argent qui sera payé par la postérité, en appelant ça du financement, n’est en fait qu’escroquer notre avenir sur une grande échelle.
La partie de vrai qui reste est quand même suffisante pour éclairer la situation économique dans laquelle nous baignons de plus en plus. Régimes de retraite insoutenables à maintenant court terme, programmes sociaux de plus en plus lourds, dette que même nos petits enfants ne pourront pas payer.
Les vieux bonshommes l’avaient vu depuis deux mille ans et n’ont pas été écoutés. Malheureusement, l’échéance est à nos portes.