Mais où donc est allé Charlie?
Par: Joffre Grondin
Où à Saint-Georges cette photo a-t-elle été prise ?
C’était un jour de printemps de mars sans soleil, pluvieux, du genre de pluie qui tombe en grosses gouttes comme si elles s’étaient syndiquées pour avoir plus de poids. Le temps idéal pour ne pas sortir, même s’il fallait sortir pour acheter quelque chose. On y va, on n’y va pas, on y va, on n’y va pas, on n’est pas fait en chocolat, on y va.
Pendant le court laps de temps que prend l’auto pour sortir du garage et se mettre en route, le syndicat des gouttes, sentant quelque chose venir et refusant l’offre de neige légère du patronat, passe au vote et la pluie s’arrête. La température excédée se laisse tomber sur le zéro et se dit que tant qu’à y être, pourquoi pas encore un degré de plus vers le moins.
Un tout petit peu de vent avec ça et on est prêt pour un peu de magie, paysage magique… un peu de féérie pas de Noël mettons.
Il faut bien comprendre la mentalité d’une goutte. Frustrée, elle gèle, réchauffée elle devient toute petite et se vaporise. Dans certaines circonstances, elle ne sait pas trop. Elle reste accrochée aux vitres, brillante, translucide, presque en Jello, sans savoir si elle doit geler ou couler.
Le conducteur du véhicule automobile ne s’était aperçu de rien, car c’était un conducteur du deuxième type.
Une parenthèse est nécessaire pour décrire les deux types principaux de conducteurs de véhicules automobiles. Le premier type est un quidam dont la tension artérielle relève du tueur potentiel. Il conduit un char d’assaut et à la moindre frustration il est prêt à couper, à crier, à insulter, probablement frapper et bien d’autres choses. Désignés par les spécialistes en santé comme type Rambo ou Rambette selon les sexes, ils refusent le diagnostic de maladie mentale plus ou moins légère et personne ne les contredit, car ils sont prêts à couper, à crier…
Le deuxième type rappelle un bovidé, bison, chameau, cheval, éléphant, un genre d’animal super sécuritaire, vous montez dessus, il vous amène là où vous voulez, vous descendez et bye bye boss. Pas de stress, on voit ça dans les films tout le temps. Le type deux considère que son véhicule ne lui sert que pour le mener d’un point à un autre et que le seul danger qu’il court est de rencontrer le type un, car ils sont prêts à couper, à crier… vous avez le topo.
Les types deux n’ont pas de nom, car ils voient très rarement les spécialistes de la santé et ainsi ne sont pas vraiment intéressants. Fermons la parenthèse.
On en était à « Le conducteur du véhicule automobile ne s’était aperçu de rien ». De rien jusqu’à ce qu’une file d’autos le fasse s’arrêter pour une lumière rouge. L’attente le fit tourner la tête vers la gauche. Et c’est ce qu’il vit.
J’ai avancé, regardez le poteau à gauche.
En fait, c’est la femme du conducteur impavide qui lui a dit « Regarde comme c’est beau! » Ça revient au même. Ça revient au même. C’est là qu’il a pris la photo. Mais c’est quand même lui qui a eu l’idée de prendre la photo. Ha!
Avançé de trois autos. Arrêté sur la jaune. Y’a encore quelques personnes qui s’arrêtent sur la lumière jaune.
Tant qu’à être à l’arrêt, le conducteur impavide, mais pas stupide a eu l’idée de prendre une photo sur sa droite. Prenant appui sur la poitrine généreuse, mais bougonneuse pour le moment de son épouse, il croqua cette photo.
Oh! Bel indice pour savoir où était Charlie.
Quand la verte lumière apparut, un 90 degrés à gauche permit de s’engager et de traverser un pont où, sur la rive opposée une autre rouge s’imposa. Un nouveau crampe à gauche et tout droit. Après quelques arrêts un petit tour à droite, et positionnement tout droit sur le stationnement.
Le patient conducteur attendait sa brave épouse qui, à peine sortie de chez sa coiffeuse, avait bravé les éléments, quand même cléments les éléments, et maintenant se gambadait de saumon en salade.
Regardant à sa gauche, voici ce qu’il vit. Vous savez maintenant où est allé Charlie. Merci Mère Nature!
Vous savez maintenant où est allé Charlie
