Réseau des entendeurs de voix québécois (REVQ)
Par: Joffre Grondin
Des journées internationales, il y en a de toutes les sortes sur à peu près tous les sujets. On ne s’étonne plus de rien ou presque. Malgré cela, vous serez peut-être un peu intrigué d’apprendre, que le 14 septembre se trouve la Journée internationale des entendeurs de voix. Hé !
Qu’est-ce que sont les entendeurs de voix ? Si vous n’êtes pas sourds, vous pouvez entendre les voix des gens autour de vous, mais ça ne fait pas de vous un entendeur de voix. Un entendeur de voix entend des voix dans sa tête.
Surprenant ? Incroyable ? Rare ? Très rare ? Malade ? Impossible ? En fait, les données sont extrêmement étonnantes.
Selon des études sérieuses, entre 4 et 10 % de la population entend des voix. Dans une ville comme Saint-Georges, 4 % représentent environ 1 300 personnes. Avant d’aller plus loin, rassurez-vous, si certains ne traitent, malheureusement, pas très bien avec ces voix, d’autres y parviennent et fonctionnent parfaitement en société. Autrement dit, pour ceux-là, vous ne soupçonnerez jamais qu’ils entendent des voix.
Études sérieuses
Marius Romme, né en 1934, psychiatre néerlandais, a été professeur de psychiatrie sociale à l’Université de Maastricht. Il est connu comme le fondateur et principal théoricien sur l’entente de voix, et a fondé le mouvement sur l’entente de voix. Pour lui, les délires, entendre des voix et avoir des hallucinations, ne sont pas liés à une maladie, mais peuvent être des réactions à des événements traumatiques de la vie. En 1987, il a créé le mouvement Intervoice. http://www.intervoiceonline.org
Est-ce que c’est sérieux ?
Il existe un groupe, le Réseau des entendeurs de voix québécois (REVQ), qui fait partie de l’Association québécoise pour la réadaptation psychosociale (AQRP) https://aqrp-sm.org/groupes-mobilisation/revquebecois/ Le site du REVQ indique sur une carte les différents groupements d’entendeurs de voix au Québec.
On peut entendre à la radio de Radio-Canada du mardi 7 août 2018 une émission où l’animateur lui-même était assez surpris de ce qui était pour lui une sorte de révélation.
Retour historique
Ce n’est peut-être qu’à la fin des années 80 que le phénomène a été examiné empiriquement, mais l’histoire passée et récente fournit des exemples suffisamment nombreux du phénomène pour se demander pourquoi quelque chose qui touche de 4 à 10 % de la population a été ignoré si longtemps.
Glissons en passant que selon ce qu’on en sait, les voix peuvent se manifester à tout âge, mais apparaissent souvent à la suite d’un traumatisme. Vous pourrez trouver plus de détails en consultant les sites référés.
De Socrate à Anthony Hopkins
Le daimôn de Socrate est passé dans la littérature classique, les voix de Jeanne d’Arc — qui l’ont menée au bûcher — sont historiquement bien connues. Descartes — je pense, donc je suis — entendait une voix. Le premier ministre anglais durant la Deuxième Guerre mondiale Winston Churchill entendait une voix qui lui disait jusqu’où s’asseoir.
En voici d’autres.
Le compositeur et pianiste Robert Alexander Schumann (1810-1856) finira dans la démence, mais pas Sigmund Freud, père de la psychanalyse ; le Mahatma Gandhi non plus ; le cas du scientiste suédois Emanuel Swedenborg (1688 – 1772) est absolument fascinant ; les expériences de l’écrivain britannique Charles Dickens, qui conversait avec ses personnages — Un conte de Noël, Scrooge — ça vous dit quelque chose ?
Rapprochons-nous dans le temps.
Le 11 octobre 1994, John Forbes Nash, Jr. gagne le prix Nobel pour des calculs dans la théorie des jeux ; Philip K Dick, un auteur de science-fiction a notamment écrit Blade Runner ; le musicien John Frusciante de Red Hot Chili Peppers ; Brian Wilson compositeur du groupe The Beach Boys, et l’acteur Anthony Hopkins, qui n’a certainement pas besoin de présentation.
Et si on pensait en dehors de la boîte !
Les entreprises les plus créatives de la planète recherchent les gens qui pensent en dehors de la boîte. Il paraîtrait que c’est payant à divers points de vue. Payons-nous une incursion gratuite.
Imaginons un instant que ces 4 à 10 % de la population qui entendent des voix dans leurs têtes, et qui ne savent pas quoi en faire, ne soit pas des « malades » ou des « dérangés », mais qu’ils soient simplement plus perceptifs que la moyenne des ours, et seraient à la fine pointe de la réalisation que leur cerveau est comme une radio qui reçoit, et non pas un générateur de pensées.
Le gros 90 à 96 % des ours est convaincu que c’est lui qui pense tout ce qui est dans sa tête et ne se rend pas compte de la forte proportion de pollution qui y règne. Les pensées polluées sont considérées comme étant la normale.
Le 4 à 10 % réalise que son radio n’est pas toujours sur le poste et qu’il y a beaucoup de parasites, les voix intrusives.
Leur gros gros problème étant qu’ils sont sûrs que ces voix ne proviennent pas d’eux-mêmes, mais ne savent pas quoi faire avec.
Si vous avez lu jusqu’ici, je présume que vous attendez le prochain épisode. C’est la fin de la saison, désolé ! Bye !
En fait, toujours en dehors de la boîte, faire un grand pas en avant voudrait dire non pas accepter de recevoir ces voix, mais de les confronter comme des éléments extérieurs intrusifs qui n’ont pas à être tolérés, qu’elles viennent de n’importe où.
L’avenir dira si ces personnes, individuellement, trouveront la force intérieure de faire le ménage de leur cerveau, de se remettre sur leur propre poste de radio.
De retour dans la boîte.
À bon entendeur, salut !