Restaurateurs furieux
Par: Joffre Grondin
Ce serait un euphémisme que de dire que la taxe rétroactive sur les boissons alcooliques que le gouvernement vient d’imposer n’a pas eu l’heur de plaire. L’Espresso, l’infolettre mensuelle de l’Association des restaurateurs du Québec, montrait que les membres étaient furieux.
Une taxe rétroactive est un peu comme une claque derrière la tête. On ne la voit pas venir et on ne peut l’éviter. L’association n’a pas tardé à réagir par la voix de son infolettre. La position était ferme. Le premier paragraphe campait la position.
« Depuis mardi 20 novembre et l’annonce par M. Nicolas Marceau, ministre des Finances et de l’Économie, de la hausse de la taxe spécifique sur l’alcool et sa rétroactivité, la colère gronde et grandit dans tous les restaurants du Québec ! Cette colère est légitime au regard de cette décision scandaleuse et injuste prise par le gouvernement », grognait l’association.
Sous forme de questions et réponses, le court article donnait des renseignements très concrets — un restaurateur se doit de l’être pour survivre et prospérer — sur l’impact de la taxe. Nous les reproduisons tels quels ci-après.
De combien est la hausse pour les boissons alcooliques vendues sur place ?
La taxe spécifique sur l’alcool est augmentée de 50 cents le litre pour les vins et les spiritueux. L’augmentation est de 17 cents le litre pour la bière de brasserie industrielle et de 5,6 cents pour celle de microbrasserie. http://www.revenuquebec.ca/documents/fr/formulaires/pz/PZ-956(2012-11).pdf
Quelles sont les bouteilles qui sont visées par cette rétroactivité ?
Toutes les bouteilles de vins, de bières et de spiritueux que vous aviez en stock le 21 novembre à 3 h du matin.
À des fins de précision, il faut noter que les bouteilles déjà ouvertes avant 3 h dans la nuit de mardi à mercredi (21 novembre 2012) sont exclues du calcul des stocks.
Les bouteilles commandées avant le 21 novembre, mais pas encore livrées doivent-elles être incluses dans l’inventaire ?
Oui, Revenu Québec est très clair sur ce point.
Concrètement, comment calculer cette rétroactivité ?
Prenons les exemples suivants, en appliquant la hausse par litre.
100 bouteilles de vin de 750 ml chacune : 100 x 0,75 l = 75 l x 0,50 $ = 37,5 $
25 bouteilles de spiritueux de 1,14 l : 25 x 1,14 l = 28,5 l x 0,50 $ = 14,25 $
Une caisse de 24 bières (brasserie industrielle) : 24 x 0,341 l = 8,18 l x 0,17 $ = 1,39 $
Quand doit-on faire l’inventaire ?
Le gouvernement, dans sa clairvoyance habituelle, a pensé que vous étiez tous debout à 3 h du matin dans la nuit du mardi 20 novembre au mercredi 21 pour réaliser l’inventaire de vos bouteilles en stock. C’est donc à cette date précise que l’inventaire aurait dû être fait !
Quel délai m’est accordé pour fournir cet inventaire ?
Un titulaire de permis d’alcool pour consommation sur place a la responsabilité de déclarer, avant le 22 décembre prochain, les bouteilles de bière, de vin et de spiritueux qu’il possédait en stock dans la nuit du 21 novembre et de payer les hausses de taxes spécifiques sur l’alcool sur ces bouteilles.
Y a-t-il déjà un formulaire d’inventaire disponible ?
Oui, vous le trouverez à l’adresse suivante : http://www.revenuquebec.ca/fr/sepf/formulaires/vdz/vdz-505.aspx
Appuis
Les appuis n’ont pas tardé. Dès le 26 novembre, la Chambre de commerce et d’industrie Nouvelle-Beauce (CCINB) « appuie les restaurateurs de la MRC de La Nouvelle-Beauce dans leurs revendications auprès du gouvernement : NON à la rétroactivité des augmentations de taxes sur les produits alcoolisés en inventaire ».
Tenant quand même à nuancer, la Chambre ajoute que « bien que notre Chambre de commerce ait bien accueilli les mesures de soutien à l’investissement du récent budget du ministre des Finances et de l’Économie du Québec, nous nous insurgeons contre certaines mesures de taxation à caractère rétroactif comme l’application de la hausse de taxes sur les boissons alcoolisées en stock le 21 novembre dernier ».
Deux jours plus tard, le 28, parlant de « mesure injuste », c’est la Chambre de commerce de Saint-Georges « appuie les restaurateurs de la région dans leurs revendications auprès du gouvernement, c’est-à-dire de dénoncer et refuser la rétroactivité des augmentations de taxes sur les produits alcoolisés en inventaire ».
Les deux Chambres jugent que la mesure n’apportera que peu de recettes à l’État et concluent unanimement que « les nouveaux barèmes de taxes ne devraient s’appliquer que lorsque les restaurateurs devront s’approvisionner en produits alcoolisés, ce qui ne devrait pas tarder avec l’approche des Fêtes ».
À votre santé !